© Dirk Kruell / Laif-Rea

La conférence sur les rythmes scolaires livre une synthèse de ses auditions : les collectivités veulent être des partenaires à part entière, souhaitent disposer d'un temps suffisant à la mise en oeuvre des changements et réclament une évaluation des coûts. Quelques points font consensus : la semaine des quatre jours fait l'unanimité contre elle ; la journée est trop longue ; la durée des vacances d'été engendre des disparités ; le périscolaire relève le plus souvent du système D...,

 

"Le débat avec les collectivités territoriales et le monde associatif a été apaisé, serein et constructif", s'est réjoui Christian Forestier, en présentant le premier rapport de synthèse de la conférence nationale sur les rythmes scolaires au ministre de l'Education nationale le 25 janvier. "En termes de descriptions, ce document est sans précédent", a poursuivi le coprésident du comité de pilotage en présentant tout d'abord les constats partagés et, en particulier, le premier d'entre eux : "Tout le monde est d'accord pour que ça change." Tout le monde, et le ministre en est également convaincu, estime que la question des rythmes scolaires ne peut et ne doit se réduire à celle de l'organisation de la semaine mais que l'approche doit être globale.

Des constats partagés

Les points soulevés, depuis le changement instauré par Xavier Darcos en 2008, ont donné lieu à des constats partagés... en particulier sur le point le plus polémique : la semaine de quatre jours en primaire. "Elle est inadaptée et fait l'unanimité dans la description de ses inconvénients : fatigue des élèves et resserrement des enseignements", souligne le comité. De même, la journée est trop longue et fatigante ; l'année scolaire est déséquilibrée ; le temps de l'enfant est morcelé par une succession de temps, de lieux et de personnels ; les temps de vie hors temps scolaire sont trop laissés aux solutions individuelles et aux aléas locaux (Christian Forestier parle de "système D, facteur d'inégalités sociales") ; la durée des vacances d'été est source de disparités... Toutes ces remarques appellent un autre consensus, la réflexion ne doit pas se limiter au scolaire stricto sensu mais englober tous les temps de l'enfant, péri et extra scolaire. Tout le monde affirme également vouloir mettre au centre des réflexions "les intérêts de l'enfant". C'est là qu'apparaissent "les faux consensus" selon l'expression de Christian Forestier et que s'exprime "la diversité voire les divergences d'opinions". "Le paradoxe peut se résumer simplement, a-t-il poursuivi, il s'agit de l'intérêt de l'élève face aux intérêts des adultes." Le comité a procédé à l'audition d'une soixantaine de ces adultes : , enseignants, représentants des cultes, représentants du monde économique et social (en particulier transport et tourisme), ministères et bien évidemment collectivités territoriales.

Partenariat, anticipation et financements

Pour ces dernières, plusieurs axes forts de convergence se dégagent de la lecture du document de synthèse. Sans surprise puisqu'elles le réclament depuis longtemps, les collectivités souhaitent être clairement identifiées comme des partenaires à part entière pour apporter des réponses dans la gestion des temps de l'enfant. L'Association des maires des grandes villes de France (AMGVF) va plus loin et souhaite que "leur qualité de partenaire soit reconnue par la loi". De même, toujours selon l'AMGVF, il faut aboutir à une "coordination et une coopération plutôt qu'au transfert des compétences". Les collectivités s'accordent également à reconnaître l'Etat seul compétent pour fixer les cadres et les grandes orientations en matière d'organisation scolaire. L'échelon local devrait alors disposer des marges nécessaires pour mettre ces orientations (par exemple horaires de débuts de journée, transports...) en œuvre sur son territoire. Si le dialogue est primordial et demande encore à être développé, l'anticipation l'est tout autant pour les collectivités. Pour l'Association des maires de France (AMF), comme pour l'AMGVF, "l'idéal serait de donner du temps aux collectivités pour une mise en œuvre effective". Pour sa part, le Réseau des villes éducatrices "propose la mise en place d'un plan pluriannuel". Le ministre l'a d'ailleurs bien compris puisqu'il a déclaré ce 25 janvier que "le temps où le ministère décidait unilatéralement que les rythmes scolaires allaient changer, est révolu". Autre question primordiale, celle du financement. Les collectivités sont prêtes à investir mais à condition "qu'on leur offre une participation effective et si elles peuvent mettre en œuvre un projet de politique éducative". L'AMF demande qu'en cas de changement des rythmes scolaires, une évaluation financière soit faite compte tenu des nombreuses incidences sur les activités périscolaires. En résumé, elles veulent pouvoir s'appuyer sur un chiffrage clair avant que les priorités de leur politique éducative ne soient décidées.

Des enjeux économiques et éducatifs

Les représentants d'élus ont insisté sur le fait que le calendrier scolaire entraîne des incidences considérables sur l'économie locale, notamment en montagne et sur le littoral. L'Association nationale des élus de montagne (Anem) réclame une modification du calendrier des trois prochaines années pour éviter des répercussions négatives sur la fréquentation touristique. Avec leurs collègues de l'Association nationale des maires des stations de montagne (ANMSM), ils souhaitent un rééxamen des vacances d'été et proposent un étalement en trois zones. Autre proposition, ces deux associations mettent en avant l'argument de la mixité sociale pour relancer les classes découvertes. Si les enjeux ne sont pas les mêmes pour tous les élus, un consensus se dégage sur un autre point, note le comité : le respect de la pause méridienne qui ne doit plus être tronquée par l'ajout d'autres activités, "pratique trop fréquente depuis la mise en oeuvre de l'aide personnalisée". Concernant les activités périscolaires, les associations d'élus insistent sur la nécessité d'une coopération entre enseignants et collectivités. Le Réseau des villes éducatives et l'Andev soulignent le "fort engagement qualitatif des villes dans le périscolaire de qualité". Les villes de Toulouse et La Roche-sur-Yon sont citées pour leurs expérimentations en la matière, expérimentations "qui ont eu des incidences positives, notamment sur les résultats scolaires".
Le comité l'avait annoncé... ce document n'est pas une somme de préconisations mais "le reflet de toutes les contributions et de toutes les opinions exprimées", comme l'a rappelé Christian Forestier. Les véritables propositions sont prévues pour juin, le ministre a demandé des scénarios à partir des thèmes tels que : lourdeur de la journée, organisation de la semaine bien sûr (avec liberté de choix ou non pour les communes), organisation de l'année, rôle de la gouvernance. Il s'agit "d'évaluer toutes les conséquences d'une évolution des rythmes scolaires sur la vie de l'', mais aussi de la société". Ensuite, Luc Chatel qui demande "audace et réalisme" "tranchera". 

Catherine Ficat

 

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